Notre pays a construit un plan stratégique pour le secteur portuaire qui comprend tous les éléments d'un cadre approprié pour trouver des solutions aux besoins exprimés à tous les niveaux, international, national, régional, local et sectoriel.
Elle se distingue en ce qu'elle est fondée sur le placement de nos ports en levier économique s'adaptant à la tendance mondiale et se transformant en gare incontournable sur les autoroutes maritimes.
Elle se distingue également par son plan d'investissement prenant en compte les capacités de financement disponibles, déterminant les priorités, réunissant toutes les parties concernées en un même partenariat dans l'élaboration des options et donnant, aux ressources humaines, un rôle fondamental et essentiel pour atteindre la meilleure efficacité possible dans la mise en œuvre des projets, avec qualité et la rapidité.
Il s’agit donc d’un cadre prospectif, global et cohérent pour développer harmonieusement le secteur portuaire, en référence commune et partagée entre toutes les parties concernées. Il prend en compte toutes les possibilités sectorielles dans une vision stratégique d’ensemble, identifie les objectifs et les moyens pour les atteindre.
En tant qu’ingénieur-expert depuis plus de deux décennies et responsable du bureau d’études MEGELEC, j’ai développé une vision portuaire qui repose sur une stratégie de développement ambitieuse et cohérente avec les politiques d'aménagement du territoire national et de préservation de l'environnement. En 2021, j’avais en ce sens adressé au président de la République une présentation détaillée, expliquant la nécessité de pourvoir ce secteur vital et j’en attends une suite. Faire face à la demande croissante
Le secteur portuaire comprend plusieurs ports ouverts au commerce extérieur, trois consacrés à la pêche industrielle, deux à son homologue artisanale et six au divertissement. Le volume total de ces activités s'élève à plus de centaines de millions de tonnes, avec plus de trente mille débarquements de navires.
La réhabilitation du secteur au cours des dix dernières années a nécessité plus de deux cents millions de dollars d'investissements annuels. Durant cette période, les flux commerciaux qui y transitent ont enregistré une croissance régulière de 6% par an en moyenne, grâce aux politiques nationales intégrant l'économie mauritanienne dans les contextes régional et international.
Il convient ici de noter qu'il existe d'autres facteurs contribuant à accroître la demande en ports, notamment les stratégies sectorielles et la proximité de l'Europe qui offre des opportunités de libre-échange et de circulation des industries et de la logistique.
Avec la cristallisation du concept « hub » (conteneurs et vrac) et l’ouverture de l’économie mauritanienne au Monde, ils offrent de nombreuses opportunités au niveau national et extérieur, ce qui nécessite d’énormes investissements et l’allocation d’espaces pour le développement de ces structures.
Parmi les stratégies sectorielles les plus importantes qui entraîneront une augmentation de ladite demande, citons ici les stratégies adoptées dans les secteurs de l'énergie, de l'industrie, de la logistique, de la pêche côtière et du tourisme.
Impact de ces politiques et stratégies
Outre l'exploitation accrue des opportunités, ces politiques et stratégies sur la production et la consommation entraîneront une augmentation du rythme de la demande en ports d'ici 2035 et ce rythme sera intensifié par la pêche en haute mer et le développement remarquable des activités de divertissement.
Se basant sur la probabilité d’un chiffre d’affaires de plus de trois cent millions de dollars par an, il est nécessaire d’assurer la qualité des services offerts et améliorer la performance et la compétitivité du trafic. Le système portuaire doit donc fournir sans délai des réponses idoines.
Les évolutions enregistrées et les transformations à réaliser dans les espaces portuaires constitueront les traits fondamentaux de ce système au cours des vingt prochaines années. Mais ces transformations doivent prendre en compte la relation harmonieuse entre la ville et le port.
Selon mon expérience et mes compétences techniques, il faut ici adopter une nouvelle approche pour améliorer les performances et renforcer la compétitivité. La mise en œuvre de la réforme du système portuaire doit ainsi produire, dès son démarrage, de la valeur ajoutée pour tous les acteurs du secteur.
Le développement de la compétitivité de l'économie nationale va de pair avec celui de ces différentes entités, conformément à la régionalisation où nous nous sommes engagés. Compte tenu de sa situation géographique, notre pays aspire à occuper une position de premier plan sur le marché atlantique du transbordement et à exploiter toutes les opportunités disponibles dans la région.
La politique que je propose vise à répondre simultanément aux exigences économiques et politiques. Répondre à la demande de ports tout en contribuant à l’atteinte des objectifs politiques nationaux implique d’apprécier en permanence des avantages comparatifs et obtenir une part appropriée dans les échanges commerciaux à travers l’océan Atlantique, dans un souci constant de contribuer à établir les équilibres régionaux et de soutenir le dynamisme économique.
Stratégie portuaire d'ici 2035
C’est au bénéfice de toutes les parties prenantes, du plus local au plus global, que cette stratégie entend contribuer au développement économique et social. Cela passe par la fourniture d'infrastructures, d'installations et de services portuaires aux normes internationales, ainsi que par l'amélioration des opportunités et la production de valeur ajoutée pour les opérateurs économiques et les citoyens, tout en respectant les normes d'exploitation responsable et durable de l'environnement.
Un tel plan repose sur sept axes : chercher à améliorer la performance en encourageant l'innovation ; améliorer les performances logistiques ; évaluer au mieux les infrastructures portuaires ; se positionner dans le contexte national, régional et international ; profiter du rôle structurant des ports ; intégrer les objectifs environnementaux et urbains dès la conceptualisation des projets d'investissement ; se rendre capable de s'adapter aux changements qui surviendront à long terme.
Cette stratégie s'appuie également sur neuf pôles portuaires qui contribueront à animer une régionalisation dynamique : l’un d’entre eux jouera un rôle central et essentiel dans l'aménagement du territoire et la mise en œuvre des stratégies sectorielles, tandis les huit autres seront attelés à des tâches complémentaires spécialisées ; chaque pôle étant amené à changer de configuration au cours des deux prochaines décennies en fonction des missions particulières qui lui seront confiées.
La mise en place d'infrastructures dans le secteur portuaire au cours des vingt prochaines années nécessite des investissements très importants. L'alignement entre les ambitions de ladite stratégie et la demande croissante, en raison des transformations majeures que connaîtra celle-ci d'ici 2035, dépendra de la progressive mise en œuvre de ces investissements, selon des priorités préalablement définies mais aussi l’évolution des tendances susceptibles de les modifier.
On aura donc soin de distinguer le financement de projets stratégiques essentiels de ceux pouvant être reportés, en l’attente des conditions appropriées à leur lancement, et de ceux, a priori moins importants, liés à des opportunités d'investissement, ou, encore, à des dimensions industrielles sujettes à doutes.
Ces investissements seront financés par l'État, les agences portuaires et des acteurs privés du secteur, dans le cadre de contrats de concession ou de partenariat entre les secteurs public et privé.
L’idée centrale de la mise en œuvre de la stratégie portuaire que je propose consiste donc à s’appuyer sur une planification ouverte, sans recourir à un programme d’investissement pluriannuel réglé pour les vingt prochaines années.
Tout au long de sa mise en œuvre, celui-ci serait modifié et adapté à l’évolution des stratégies sectorielles nationales et internationales, celles des acteurs nationaux et internationaux, et, bien évidemment, aux aléas de la demande réelle en ports.
Pour que la stratégie portuaire soit pratique et objectivement efficace, les pouvoirs publics doivent disposer d'un outil de suivi qui leur permette de déterminer le moment approprié pour réaliser tel ou tel investissement et, en conséquence, sa préparation appropriée.
Cela s'appliquera à chaque port, dans le cadre de sa vision à long terme au sein du système portuaire mauritanien global. Cet outil de suivi aura donc à s’intéresser aux parcours d'investissement couvrant différentes options, de manière à régler au mieux l’offre à la demande.
Bien outillé, il sera particulièrement attentif aux indicateurs d'alerte qui permettront à la gouvernance portuaire de prédire l'évolution du marché.
CHEIKH AHMED OULD MOHAMED
INGÉNIEUR
CHEF DU SERVICE « ÉTUDES ET DÉVELOPPEMENT »
ÉTABLISSEMENT PORTUAIRE DE LA BAIE DU REPOS
NOUADHIBOU
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